Vol. 11 No. 3 (2024): Pathways to decolonial governance and planetary health
L’image de couverture est un clin d’œil à la saison, mais aussi aux natures mortes du XVIIe siècle, dans lesquelles le citron était un objet d’étude privilégié. Sa présence dans de telles scènes peut être interprétée de différentes manières. Il s’agit d’un symbole à la fois de luxe et de longévité, de fierté et de décadence. C’est aussi un agent acidifiant.
Les articles de ce numéro attirent notre attention aussi bien sur l’amertume que la douceur : les « approches coloniales envahissantes et destructrices [...] de la gouvernance du système alimentaire » que Shailesh Shukla, éditeur de RCÉA, décrit dans son éditorial, mais aussi les modes de résistance, l’innovation, le (dés)apprentissage et l’établissement de relations qui surviennent tout à la fois alors que nous nous efforçons de changer la façon dont nous réglementons la production et la distribution des aliments.
Nous commençons par un rapport de terrain sur les petits espaces de culture. Richard Bloomfield et Deishin Lee se penchent sur la pénurie actuelle et imminente d’agriculteurs et d’agricultrices en cherchant à comprendre les expériences de petits producteurs maraîchers de première génération, et ce, en vue d’éclairer les changements politiques qui soutiennent et encouragent davantage d’agriculteurs de ce type, lesquels contribuent directement aux systèmes alimentaires locaux. À partir du sud-ouest de l’Ontario, Séraphin Balla et Caroline Hervé nous emmènent à Cambridge Bay pour examiner deux préoccupations majeures et intimement liées des communautés inuit : l’insécurité alimentaire et la crise du logement, autour desquelles, cela est souligné, la participation des Inuit aux décisions s’impose. Rotz et ses collaborateurs examinent à leur tour le rôle de l’alimentation en tant qu’arme de colonisation et outil de libération, en se concentrant principalement sur Gaza sous la domination coloniale israélienne. Ils attirent également notre attention sur des schémas semblables de vols territoriaux historiques par la colonisation et de dévastation de l’environnement au Canada.
Dans le contexte du mouvement de souveraineté alimentaire de Toronto, Seidman-Wright et ses collaborateurs soutiennent que les activistes de l’alimentation ont la responsabilité de renoncer aux prétentions coloniales à l’autorité en matière de systèmes d’alimentation et de savoir sur les terres volées, et de plaider pour des changements systémiques plus profonds qui redistribuent le pouvoir et les ressources aux peuples autochtones et aux projets dirigés par des Autochtones. Mary Coulas et Gabriel Maracle examinent les relations entre le gouvernement du Canada et les peuples autochtones et la manière dont ces relations ont affecté et pourraient affecter le développement de la politique alimentaire nationale. Au-delà des parties prenantes, ils créent discursivement un espace pour le partenariat autochtone.
Sarah Marquis s’intéresse aux technologies de l’agriculture numérique (comme les machines robotisées, l’utilisation des mégadonnées, les logiciels de gestion agricole et les drones) et au langage utilisé pour les décrire dans le paysage politique et médiatique canadien. Quant à Nil Alt, elle nous offre un compte rendu de l’ouvrage The Political Economy of Agribusiness: A Critical Development Perspective de Maria Luisa Mendonça.
Pour conclure, Lenore Newman répond à notre Questionnaire Choux. Elle y propose notamment un mot ou un concept décrivant un système alimentaire admirable. Voici un indice : ce n’est pas « colonial ». Et dans un esprit de réciprocité, elle nous invite à réfléchir au pire repas que nous ayons jamais mangé.
Bonne dégustation !
image de couverture par Alexia Moyer